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Lectures et chroniques...

Chroniques portant sur des polars, mais pas seulement. Vous y trouverez aussi quelques entretiens avec des auteurs. Blog de Jacques Teissier

Âmes de papier, de Marielle Boisson

ames_de_papier_ter.jpgCe livre de Marielle Boisson est aussi déroutant que stimulant. Non seulement il est assez riche pour permettre plusieurs niveaux de lectures, mais  de plus il nous fait vivre plusieurs retournements de situations analogues à ceux que l’on peut rencontrer dans certains romans de Pierre Lemaitre, comme Alex, ou plus encore Robe de marié.


Chacune des trois parties est centrée sur un des personnages qui font le cœur de l’histoire : Fabien, Roxane, Ariane. Bien sûr, d’autres vont apparaître autour d’eux, comme Fred, l’ami fidèle de Fabien, ou encore Vincent, un étrange jeune garçon qui semble subir des sévices de la part... de la part de qui, au fait ? De sa mère ? Mais cette mère, qui est-elle vraiment ? ... C’est une des nombreuses questions qui restent en suspens pendant une grande partie du livre.


Fabien est donc le narrateur de la première partie. Après une rupture sentimentale, il croise Ariane, une jeune femme dont le visage est celui d’une madone de Botticelli, un visage si pur et si parfait qu’elle lui fait penser à un ange.


Jusque là, me direz-vous, rien d’inquiétant ! On peut même penser qu’une telle rencontre est plutôt plaisante... Sauf quand Fabien finit par se persuader que la belle ne se contente pas de ressembler à un ange, mais qu’elle EST réellement un ange. D’ailleurs, que pourrait-il penser d’autre lorsqu’elle lui apparaît dans toute sa splendeur, alors que ses amis assis à côté de lui ne la voient pas ?


Le lecteur, arrivé à ce point de l’histoire, n’a semble-t-il que deux possibilités : soit le personnage de Fabien est en train de dérailler sévèrement, soit l’auteur nous embarque dans une histoire fantastique où les fantômes côtoient sans complexe les anges, un monde où la raison est mise aux oubliettes au profit de l’imagination la plus débridée et la plus fantasque.

 

Si vous croyez cela, vous avez tout faux ! En réalité, et c’est toute l’astuce de l’auteur, il y a une troisième option qui va vous exploser à la figure dans la troisième partie du livre. Cette option, je l’ai d’autant plus appréciée que je suis tombé à pieds joints dans le piège tendu par Marielle Boisson. Or, comme amateur de polars et de thrillers (et même si ce livre n’en est pas un), lorsque je perds la partie de cache-cache qui se joue entre l’auteur et moi, j’estime que celui-ci a rempli l’essentiel de son contrat. Incontestablement, c’est le cas ici !

 

Roxane, qui est au centre de la deuxième partie, est une jeune femme qui se méfie des hommes. Elle est cependant très attirée par Fred, l’ami de Fabien. Fred dont la belle Ariane (notre Ange de la première partie, qui est aussi l’amie de Roxane) lui conseille de se méfier : il est comme tous les autres hommes, il ne faut pas se fier à lui, d’ailleurs il ne faut pas se fier aux apparences, lui dit-elle en substance.

 

Et c’est en effet ce que nous comprenons dans la dernière partie : avec Marielle Boisson, le lecteur, tout comme Roxane, ne doit pas se fier aux apparences !

 

Si le thème principal du livre semble être celui de la folie, cette question de la folie (envisagée comme rapport troublé entre la conscience qu’un individu a de la réalité extérieure, et cette réalité  elle-même)  pose d’une façon presque naturelle la question d’un autre rapport, celui qui relie le romancier et ses personnages.


Cette question, Marielle Boisson la prend à bras le corps dans le basculement final de la troisième partie. Ces personnages, avec qui nous avons vécu le temps des 140 pages du livre, ne sont-ils vraiment que des « âmes de papier » comme nous le suggère le titre du livre ? Ne sont-ils pas plus que cela, peut-être plus que ce que l’auteur lui-même l’aurait souhaité ? Dans les rapports entre le romancier et ses personnages, qui est le manipulateur, qui est le manipulé ? Et de quelle façon ce rapport est-il brouillé par le surgissement de celui qui va apporter un regard neuf, extérieur, critique : le lecteur ?

 

Mais même si ces questions sont bien posées par le roman de Marielle Boisson, je veux dire surtout ici le plaisir que m’a apporté la découverte d’un univers personnel, original, unique, celui d’un auteur qui, sans chercher à suivre les modes, écrit avec sincérité et authenticité. Et en cela, Marielle Boisson manifeste avec éclat, dans ce nouveau roman, qu’elle est bien un véritable écrivain.


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F
<br /> Voilà un livre bien tentant...je le note sur mon parchemin...merci beaucoup pour ce bel article qui nous met l'eau à la bouche!!!!<br />
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